Alexandre le Grand reçut de son père un cheval qu'il nomma Bucéphale, ce qui signifiait "tête de taureau". Une liste sur le chanfrein de cette forme éponyme l’aurait prédestiné, elle nous est rappelée sous la forme d’un fil conducteur d’huile orangée dans cette œuvre.
L’excitabilité de cet animal était telle, que personne n'avait jamais réussi à le monter, fougue traduite par le fluide blanc sur cette peinture. Alexandre releva le défi de dompter l'indomptable. Après l’observation du comportement de l’équidé, cherchant sa faille, il s'aperçut que l'animal avait peur de son ombre, ici tâches sombres.
Apollon, surgissant du ciel gris de tumulte, observe la scène depuis l’Élysée et inspire le jeune prince, qui place le cheval face au soleil et l'enfourche.
Rencontre solaire et sensorielle, ces âmes jumelles, celles de l’homme et de l’animal ensemble, s’incarnent et se matérialisent, un magma de tâches pastel s’entrelacent, s’apprivoisent et s’unissent : telle une prophétie, son unique cavalier serait, pour toujours, Alexandre.
Le cheval plie alors le genou pour aider son maître à monter ; jusqu’à la mort de l'animal, Alexandre et Bucéphale combattirent ensemble. C’est l’histoire de conquêtes, de voyages d’Orient, de rêves, de dépassement de soi et de l’autre. Ils ne feront qu’un, de cette fusion ils seront mythiques, ils seront Centaure.
« Qui veut voyager loin ménage sa monture… »
— Racine, Les plaideurs